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MAE  : clarification de la portée du principe ne bis in idem

Pénal - International, Procédure pénale
04/05/2021
Dans une décision du 29 avril 2021, la Cour de Justice de l’Union européenne revient sur la portée du principe ne bis in idem applicable lors de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen pour des infractions ayant fait l’objet d’une condamnation dans un pays tiers.
Concrètement, une autorité judiciaire d’un État membre peut refuser l’exécution d’un mandat d’arrêt européen (MAE) en cas de condamnation de la personne visée dans un pays tiers, et ce, même si la peine n’a pas été purgée en intégralité.
 
En 2019, un MAE est émis par les autorités judiciaires allemandes contre un homme afin d’exercer des poursuites pénales pour des faits commis à Berlin en 2012. Il est interpellé aux Pays-Bas en mars 2020 et s’oppose à sa remise en faisant valoir qu’il a déjà été poursuivi et jugé pour ces faits en Iran. Il a été condamné pour une partie des faits et acquitté définitivement pour les autres. Presque l’intégralité de sa peine a été exécutée, il a bénéficié d’une remise de peine, accordée en conséquence d’une mesure de clémence générale proclamée par une autorité non juridictionnelle, le Guide Suprême d’Iran.
 
Il soutient que  le principe ne bis in idem, tel qu’énoncé à l’article 4, point 5, de la décision-cadre du 13 juin 2002 relative au MAE et aux procédures de remise entre États membres, transposé en droit néerlandais, s’oppose à l’exécution du MAE le concernant. En effet, il prévoit que l’autorité judiciaire d’exécution peut refuser d’exécuter un MAE si la personne recherchée a été définitivement jugée pour les mêmes faits par un pays tiers, à condition que, en cas de condamnation, celle-ci ait été subie ou soit actuellement en cours d’exécution ou ne puisse plus être exécutée selon les lois du pays de condamnation.
 
L’autorité judiciaire des Pays-Bas décide alors de saisir la CJUE quant à l’interprétation de cet article, savoir sur la marge d’appréciation.
 
Réponse :
- les autorités judiciaires doivent disposer d’une marge d’appréciation leur permettant de procéder à un examen au cas par cas, en prenant en considération l’ensemble des circonstances pertinentes, pour déterminer s’il y a lieu ou non de refuser d’exécuter un MAE  ;
- la notion de « mêmes faits » figurant plusieurs fois dans la décision cadre doit faire l’objet d’une interprétation uniforme, peu importe la circonstance que l’article 3, point 2, concerne les jugements rendus dans l’Union alors que l’article 4, point 5, vise ceux rendus dans un pays tiers ;
- la condition de l’exécution de la condamnation est remplie en l’espèce, la nature de l’autorité ayant accordé la remise de peine ou encore les considérations sont sans incidence.
 
Sur ce dernier point, l’autorité judiciaire d’exécution dans l’exercice de la marge d’appréciation dont elle dispose aux fins de l’application du motif de non-exécution facultative de l’article 4 point 5 de la décision-cadre, doit « mettre en balance, d’une part, la prévention de l’impunité ainsi que la lutte contre la criminalité et, d’autre part, la garantie de la sécurité juridique de la personne concernée ».
 
La juridiction devra alors résoudre l’affaire conformément à cette décision.
 
Source : Actualités du droit