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La semaine du droit des sûretés

Civil - Sûretés
10/05/2021
Présentation des dispositifs des arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit des sûretés, la semaine du 3 mai 2021.
Cautionnement – crédit-bail – fraude 
« Selon l’arrêt attaqué (Nancy, 29 mai 2019), par un acte du 1er avril 2005, la société Franfinance a conclu avec la société C (la société) un contrat de crédit-bail portant sur divers matériels. À la suite d’impayés de loyers, le crédit-bailleur a accordé à la société des échéanciers, par avenant du 5 novembre 2010. Par un acte du 9 décembre 2010, M. C, dirigeant de la société, s’est rendu caution solidaire du paiement des sommes dues au titre du contrat de crédit-bail.
De nouveaux loyers étant restés impayés, le crédit-bailleur et le crédit-preneur ont conclu, le 19 avril 2013, un protocole de règlement, se substituant à l’avenant du 5 novembre 2010. Ce protocole n’ayant pas été respecté, le crédit-bailleur a assigné la société et la caution en paiement.
 
Il résulte du principe fraus omnia corrumpit que la fraude commise par la caution dans la rédaction des mentions manuscrites légales, prescrites, à peine de nullité du cautionnement, par les articles L. 341-2 et L. 341-3, devenus L. 331-1 et L. 343-2 et L. 331-2 et L. 343-3, du Code de la consommation interdit à cette dernière de se prévaloir de ces dispositions.
Ayant constaté, par motifs adoptés, que les signatures de M. C figurant sur l’acte de cautionnement et sur la fiche de renseignements étaient strictement identiques et que M. Cne pouvait donc alléguer n’avoir pas signé l’acte de cautionnement, puis relevé, par motifs propres, s’agissant des mentions manuscrites, qu’en dépit des précisions données dans l’acte, lequel comporte trois pages, toutes paraphées par le souscripteur, dont la dernière précise de manière très apparente et en caractères gras, que la signature de la caution doit être précédée de la mention manuscrite prévue par la loi, M. C a néanmoins « cru devoir faire » rédiger ladite mention par sa secrétaire, au lieu d’y procéder lui-même, détournant ainsi sciemment le formalisme de protection dont il se prévaut désormais pour tenter de faire échec à la demande en paiement, la cour d’appel, abstraction faite du motif critiqué par la troisième branche, a exactement déduit de la faute intentionnelle dont elle a ainsi retenu l’existence dans l’exercice de son pouvoir souverain, que la caution ne pouvait invoquer la nullité de son engagement.
Le moyen n’est donc pas fondé.
 
Loin de se fonder sur la seule fiche de renseignements signée par M. C le 9 mars 2011, l’arrêt retient que le salaire annuel de 27 000 euros indiqué sur cette fiche, postérieure à la date du cautionnement de trois mois seulement, corroborait le niveau de rémunération résultant des fiches de paie afférentes à l’année 2010, mentionnant un salaire d’environ 2 250 euros par mois, et que, s’agissant du patrimoine immobilier détenu par la caution, cette dernière s’est abstenue de justifier de sa consistance précise et chiffrée, les documents produits par M. C étant insuffisants, en l’absence de précisions complémentaires, à démontrer l’inadéquation existant, à la date de la signature de l’acte de cautionnement, soit au 9 décembre 2010, entre la valorisation du patrimoine immobilier de la caution et le montant de son engagement. En l’état de ces constatations et appréciations, la cour d’appel, qui a retenu que M. C ne rapportait pas la preuve de la disproportion manifeste alléguée, à la date de son engagement, a légalement justifié sa décision.
Le moyen n’est donc pas fondé.
 
Le crédit-bailleur est tenu à un devoir de mise en garde à l’égard d’une caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n’est pas adapté aux capacités financières de la caution ou qu’ il existe un risque de l’endettement né de la conclusion du crédit-bail garanti, lequel résulte de l’inadaptation dudit contrat aux capacités financières du crédit-preneur. Ayant relevé que M. C était le gérant de la société cautionnée depuis de nombreuses années, faisant ressortir son expérience de la vie des affaires, la cour d’appel, qui ne s’est pas ainsi fondée sur la seule qualité de gérant, abstraction faite des motifs critiqués par les deuxième, troisième et quatrième branches, a pu retenir le caractère averti de la caution, dispensant le crédit-bailleur de toute obligation de mise en garde à son égard.
Le moyen, pour partie inopérant, n’est donc pas fondé pour le surplus »
Cass. com., 5 mai 2021, n° 19-21.468, P *
 

Caution – action subrogatoire – prescription 
« Selon l’arrêt attaqué (Nîmes, 21 juin 2018), par un acte du 5 août 2003, la société Caisse d’épargne Languedoc Roussillon (la banque) a consenti à Mme W deux prêts de 72 000 euros et de 35 000 euros, garantis par l’engagement de caution solidaire de M. I. Mme W, ayant été défaillante dans l’exécution de ses obligations, la banque a mis en demeure le 22 juin 2010, M. I, qui lui a ensuite payé la somme 63 233,06 euros contre remise d’une quittance subrogative, le 13 décembre 2010. Ayant vainement mis en demeure Mme W de le rembourser, M. I a assigné cette dernière le 5 décembre 2015.
 
Vu les articles 2224 et 2306 du Code civil :
Aux termes du second de ces textes, la caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu’avait le créancier contre le débiteur et il résulte du premier que le créancier dispose, pour agir contre ce dernier, d’un délai de cinq ans à compter du jour où il a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son action.
Pour déclarer l’action de M. I recevable et condamner Mme W à lui payer la somme 68 233,63 euros, l’arrêt retient que l’action subrogatoire exercée par M. I est une action personnelle soumise à une prescription de cinq ans en application de l’article 2224 du Code civil à compter du jour où il a connu les faits lui permettant de l’exercer, soit après le paiement effectué en exécution du contrat de cautionnement, à compter de la date de délivrance de la quittance subrogative, le 13 décembre 2010.
En statuant ainsi alors que la caution qui est subrogée dans les droits du créancier ne dispose que des actions bénéficiant à celui-ci, de sorte que l’action subrogatoire de la caution contre le débiteur est soumise à la même prescription que celle applicable à l’action du créancier contre le débiteur, laquelle ne commence à courir que du jour où le créancier a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».
Cass. com., 5 mai 2021, n° 19-14.486, P *         
 
 
 

*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 10 juin 2021 
 
Source : Actualités du droit