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Point de départ du délai de prescription de l’action paulienne : la connaissance effective de l’acte contesté

Civil - Contrat
15/12/2021
Une banque est réputée avoir eu connaissance d’une donation-partage par sa publication au service de publicité foncière. Par conséquent, elle ne peut s’y opposer par une action paulienne plus de cinq ans après cette publication.
L’associée d'une société en nom collectif se porte caution solidaire de cette société au profit d’une banque. Puis, par acte authentique publié au service de la publicité foncière, elle consent à ses deux enfants une donation-partage de la nue-propriété d'un immeuble d'habitation lui appartenant. Après la liquidation judiciaire de la société et sa condamnation en qualité de caution, la banque l’assigne avec ses enfants en inopposabilité de la donation-partage.

Les juges du fond rejettent sa demande. Ils déclarent irrecevable comme prescrite son action paulienne, fixant le point de départ du délai de prescription à la date de publication de la donation-partage au service de publicité foncière. La banque était réputée avoir eu connaissance de son existence dès cette date et avait été en mesure d’exercer ses droits pendant un délai de 5 ans à compter de cette date.

La banque se pourvoit en cassation : « le délai de la prescription applicable à l'action paulienne suppose, pour commencer de courir, que le créancier connaisse, ou doive à tout le moins connaître, l'existence de l'acte qu'il entend voir déclarer inopposable à son endroit ; la publication de cet acte au service de la publicité foncière ne fait pas, à elle seule, courir le délai de la prescription. » La cour d'appel qui ne justifie pas que la banque avait ou aurait dû avoir la connaissance effective de la donation-partage a violé l'article 2224 du Code civil, ensemble l'article 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955.

Son pourvoi est rejeté. La Cour de cassation approuve la cour d’appel. Celle-ci « a exactement retenu que l'action paulienne, qui vise à rendre inopposable à un créancier l'acte fait par l'un de ses débiteurs en fraude de ses droits, était une action de nature personnelle soumise à la prescription de droit commun de l'article 2224 du Code civil, courant à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. »

Ce n'est que lorsque la fraude du débiteur a empêché le créancier d'exercer son action que le point de départ en est reporté au jour où il a effectivement connu l'existence de l'acte fait en fraude de ses droits (Cass. 3e civ., 12 nov. 2020, n° 19-17.156, publié au Bulletin).

Dans l’affaire jugée ici, l’acte de donation-partage avait été régulièrement porté à la connaissance des tiers du fait de sa publication au service de la publicité foncière. La banque était réputée avoir connaissance de son existence dès cette date. La cour d'appel en a déduit, à bon droit, que l'action qu'elle avait engagée plus de cinq ans après était prescrite.
 
Pour aller plus loin, voir Le Lamy droit du contrat, n° 1171.
Source : Actualités du droit