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Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté recommande l'interdiction de la rétention d'enfants

Civil - Personnes et famille/patrimoine
Public - Droit public général
15/06/2018
A été publié au Journal officiel du 14 juin 2018, un avis du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), qui recommande l’interdiction de l’enfermement des mineurs étrangers dans les centres de rétention administrative (CRA).
Rappel de la condamnation de la France par la CEDH

Le CGLPL rappelle, d’abord, la condamnation de la France en 2012 par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) pour violation des articles 3 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (CESDH), en raison notamment du jeune âge des enfants en rétention, de la durée et des conditions de détention subies (CEDH, 19 janv. 2012, Req. n°s 39472/07 et 39474/07, Popov c/ France). À la suite de cette condamnation, une circulaire avait été adressée au préfet afin que soit assurée en toutes circonstances la protection de l'intérêt supérieur de l'enfant et privilégié l’assignement à résidence des familles avec enfants (circulaire du 6 juillet 2012, relative à la mise en œuvre de l'assignation à résidence prévue à l'article L. 561-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en alternative au placement des familles en rétention administrative sur le fondement de l'article L. 551-1 du même code).

Augmentation des rétentions en France et pratiques préfectorales locales

Le CGLPL constate, toutefois, que le nombre de rétention d’enfants a augmenté continuellement depuis 2013 et que certaines préfectures utilisent le placement d’enfant mineur pour faciliter le travail de l’Administration en vue de l’éloignement des familles, évitant ainsi un déplacement au domicile de la famille. Selon le CGLPL, la majorité des préfectures ne procède pas à ces placements sans que soit, pour autant, observées un échec de leur politique d’éloignement.

Conséquences de la rétention sur les enfants

Pour le CGLPL, malgré l'amélioration des conditions matérielles d'accueil, l’enfermement des enfants porte atteinte à leur intégrité psychique. C’est donc le principe même de l’enfermement qui doit être remis en cause, en raison des traumatismes qu’il provoque chez les jeunes enfants et ses conséquences sur les relations parents-enfants et sur l’exercice de l’autorité parentale.

Recommandation

Le CGLPL considère, à l’aune de ces constatations, que l’enfermement d’enfants en centre de rétention est contraire à leurs droits fondamentaux, tout comme la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH, avis n° 01-17, 26 janv. 2017). Il constate, aussi, que le texte du projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, n'évoque nullement l'enfermement des enfants avec leurs parents en CRA. L'allongement de la durée de la rétention de quarante-cinq à quatre-vingt-dix jours, comme par ailleurs les dispositions concernant la réduction des délais en matière de demande d'asile, pourront les concerner.

Aussi, le CGLPL recommande que l'enfermement d'enfants soit interdit dans les CRA et a fortiori dans les locaux de rétention administrative, seule la mesure d'assignation à résidence pouvant être mise en œuvre à l'égard des familles accompagnées d'enfants.

Par Marie Le Guerroué
Source : Actualités du droit