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Constitution de partie civile abusive et préjudice matériel

Pénal - Procédure pénale
17/04/2020
La Cour de cassation, dans un arrêt du 31 mars, rappelle que la décision de rejet d’une amende civile rendue par le juge d’instruction pour constitution de partie civile abusive ou dilatoire, ne s’impose pas au tribunal correctionnel saisi d’une action en dommage-intérêts sur le fondement de l’article 91 du Code de procédure pénale. 
En instance de divorce depuis 2012, l’épouse porte plainte et se constitue partie civile pour viols contre son époux en 2013. Le juge d’instruction, au terme de l’information, rend une ordonnance de non-lieu et dit n’y avoir lieu à condamner la requérante à une amende civile pour constitution de partie civile abusive ou dilatoire en 2015 comme le permet l’article 177-2 du Code de procédure pénale.
 
Trois moi plus tard, l’époux fait citer l’intéressée devant le tribunal correctionnel, sur le fondement de l’article 91 du Code de procédure pénale, aux fins de condamnations à lui payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts. Pour rappel, cet article permet à une personne visée dans une plainte, après qu’une décision de non-lieu ait été rendue et sans préjudice d’une poursuite pour dénonciation calomnieuse, de demander des dommages et intérêts au plaignant, si elle n’use pas de la voie civile. Le tribunal accueille ces demandes.
 
Les deux membres du couple interjettent appel de la décision.
 
Les juges du second degré confirment le jugement et énoncent que « le refus d’un juge d’instruction de prononcer une amende civile pour constitution de partie civile abusive ou dilatoire ne fait pas obstacle à une action introduite sur le fondement de l’article 91 du Code de procédure pénale, laquelle repose sur l’existence d’une faute ou une imprudence au sens de l’article 1241 du Code civil ». Ajoutant qu’avant le dépôt de plainte en 2012, la femme avait déjà déposé cinq plaintes pour viol, harcèlement moral, enlèvement d’enfant, refus de remise de passeport, fraude et usage de faux. Toutes ces plaintes ayant été classées sans suite. Et l’intéressée s’est constituée partie civile devant le juge d’instruction pour les faits de viols, dans un contexte marqué par un divorce très conflictuel « sans faire état d’éléments sérieux susceptibles de corroborer ses accusations, particulièrement graves s’agissant de faits criminels ».
 
Pour eux, l'épouse s’est constituée partie civile de manière téméraire et a commis une faute causant un préjudice matériel et moral à son ancien mari, dont elle doit réparation.
 
Elle décide alors de former un pourvoi en cassation dénonçant un défaut de motifs, un manque de base légale et une méconnaissance de l’autorité de la chose jugée.
 
La Haute juridiction (Cass. crim., 31 mars 2020, n° 19-82.697) va néanmoins rejeter son pourvoi. Pour elle :
- « la décision de rejet d’une amende civile rendue par le juge d’instruction en application de l’article 177-2 du Code de procédure pénale, ne s’impose pas au tribunal correctionnel saisi dans les conditions prévues à l’article 91 du même Code » ;
- « les juges ont souverainement apprécié la faute commise par la partie civile au sens de l’article 1241 du Code civil ».
 
Source : Actualités du droit